18/08: Skaftafell (et débriefing)

Publié le par bigfoot

Je me lève vers 9h00.
Je plane, c'est un truc de dingue.

Je glandouille. j'ai du mal à me dire que dans deux heures, je serai au milieu du monde.
Surprenant, mais ça me fait plaisir. L'envie de partager comme jamais.

Pour rejoindre skaftafell, c'est assez simple. Ou on passe par Svartifoss en coupant à travers les collines, ou on passe par l'extrémité sud et on longe la colline jusqu'au visitor center.

Pas envie de monter encore aujourd'hui et vu que je vais rester dans le quartier, je ferai les trucs sympa sans le sac à dos.
Donc c'est comme si on marchait sur la plage, sauf qu'il y'a pas la mer. C'est pas terrible mais je m'en fous. Je suis ailleurs.
Pfff, il est loin quand même le coin sud.
La Morsa. Pas de soucis, il doit y'avoir un pont un peu plus loin.Même sans pont, ça me stresserait pas vraiment.
Et bien voilà, nous y sommes.

Encore trente minutes. En phase d'atterrissage. Les baraquements des gens qui bossent dans le parc.
Pas beau...
Le camping apparait... Mais c'est immense.
Je commence à croiser un peu de monde... pas un qui dit bonjour... commence vraiment à revenir sur terre.

Visitor Center. L'abomination... Un grand parking style Carrouf bondé. Au moins 500 bagnoles.
Ambiance Carrouf aussi. Chacun totalement dans sa bulle vivant sa vie.

Je me dis juste que c'est le choc de l'arrivée, que je vais encaisser le coup et qu'après je vais réussir à surmonter le malaise.
Je m'assois à la table sous l'auvent du Visitor center. Pendant 10 minutes, je regarde passer les gens, les écoute. Toutes les langues. Beaucoup de Français évidemment. Je subis vraiment "l'agression" des gens qui rient, qui ralent, des gamins qui s'amusent, des couples qui s'engueulent.

Pas un regard amical ou intrigué vers moi, hormis sur ma tenue crado et mon bas de pantalon déchiré dans le champ de lave du Laki et massacré par mes crampons.
Moi qui espérais que je suciterai un peu d'intérêt, que les gens voudraient discuter avec moi de mon itinéraire, de là où je viens.
Bien sûr qu'ils s'en foutent et c'est normal. Chacun sa vie, son trip son délire. J'étais dans ma bulle, je me sentais un peu héroïque pour avoir franchi 50 km de glaciers en solo, traversé des gués impressionnants et marché 300 km en 12 jours dans des conditions parfois dantesques.
Oui, mais c'était ma vie, pas celle des gens qui viennent jusqu'ici dans le confort de leur voiture. Ils ne peuvent comprendre ce que je ressens tant qu'ils n'auront pas vécu ce type d'aventure. Moi même ne m'intéresse aux "marginaux" de mon espèce que depuis peu, que depuis que je fonctionne dans le voyage nature.

Le choc n'en est pas moins terrible. Je susi obligé d'aller me cacher derrière le Visitor center pour hurler ma rage, pleurer toutes les larmes de mon corps et balancer des grands coups de pied dans les murs pour faire passer ma colère.
Non, je ne veux pas revenir dans ce monde. J'étais si bien il y'a une heure encore.
De nouveau le rouleau compresseur vame passer dessus.

Nouvel essai. A moi d'essayer d'aller voir les gens. Oui, mon aspect barbu de deux semaines et amaigri (perdu au moins 10 kg, comme d'hab) et ma tenue couverte de boue et d'accidents culinaires dont j'ai le secret doivent bien être rébarbatifs mais quand même. Y'a rien à faire, le courant passe pas. Les discussions n es'engagent pas.
Juste un peu avec deux filles qui ont fait du cheval pendant trois semaines dans l'est.
Sauf que elles sont pas capables de me dire où, parce que bon, c'est pour le cheval qu'elles sont venues, que ce soit en islande ou au Burkina-Faso, elles s'en carrent grave.

Juste à l'accueil du Visitor center où je me suis présenté pour signifier la fin de mon voyage (indispensable vis à vis des secours), la fille manifeste un intérêt certain à mon trip. Elle appelle sa collègue, pas sure de comprendre d'où je viens (l'accent islandais, malgré toute ma bonne volonté est difficile à reproduire, surtout la prononciation de Þorsmörk).
Parce que ça lui parait absolument impossible de venir de là. Elle va chercher une carte grande échelle dans un rayon de vente au public et la déplie pour que je lui explique mon trajet.
"oauh!!!  you're an amazing guy"
je sais, je sais , modesté-je.

ca me remet un peu de baume au coeur. mais je ne peux pas rester ici. L'abomination grouillante continue. Trop de monde d'un coup. Je ne peux pas. Il faut que je m'en vais (sic...)

Premier bus pour Kirkjubaejarklaustur dont le nom comporte plus de lettre que d'habitants pour me reposer en attendant Tatiana vendredi prochain...
Pour le calme, pas déçu, mais bon, pour le reste, je me suis pas trop éclaté, complètement sorti de mon trip.
Vivement vendredi...


DEBRIEFING

Je mettrai les photos du voyage en voiture later, mais comme il s'agit d'endroit beaucoup plus touristiques que ce que j'ai vus à pied, les photos n'apporteront pas grand chose à ce qu'on peut voir sur d'autres sites généralistes.
Je ne pense pas non plus raconter cette partie là du voyage.


Le débriefing... très court...
1 regret, 1 déception, 1 erreur
Pour le reste, c'est parfait.
Le laugavegur (juste ma partie), magnifique mais comme prévu trop couru à mon goût
Le strutivegur, c'est magnifique aussi, totalement différent du Laugavegur, malheureusement sous la pluie continue mais attention, complètement non balisé là où je suis passé. Ca méritera une autre visite.

Mais je suis plus fort à raler qu'à parler de ce qui m'a plû.
Donc
Le regret:
avoir écouté les gens du coin, ne pas avoir suivi mon intuition. J'en ai raté un fait de gloire (la traversée de la Skafta) et je suis passé à côté, je pense de l'endroit le plus beau d'islande. Vu de la rive gauche de la skafta, la partie Skaelingar Sveinstindur m'a paru extraordinaire, d'une beauté indicible, sans parler de Langisjor, complètement  caché à ma vue.

La déception:
le Laki. Est ce que c'est lié à la fatigue du détour de trois jours? au fait que je suis arrivé au Laki après avoir vu l'extraordinaire zone d'Uxatindar? Peut être mais je persiste à dire que le Laki même n'est pas une zone agréable pour les marcheurs. on est confiné à de la très grosse piste trop roulante et très utilisée (encore que je sois passé très tard et très tôt, j'ai eu la chance de ne croiser aucun véhicule).
Mon bivouac dans l'alignement des cratères a été génial, mon petit tour sur certains volcans magnifique, mais voilà, le courant n'est pas passé. Je m'attendais à trop peut être.

L'erreur:
avoir craqué en arrivant à Skaftafell. Si j'avais réussi à surmonter mon coup de blues terminal, j'aurais pu marcher trois jours pleins dans le parc. Je suis passé à côté de Kristinartindar, d'une nouvelle tentative à Blatindur et de la vallée rougeoyante de Kjos.
Sur le coup, j'ai été très mauvais, oui... mais bon, les états d'âme ne se commandent pas.


Et bien voilà... A l'an prochain.

Je commence à réfléchir à un nouvel itinéraire mais ce sera plutôt en étoile à partir d'un camp de base. Ces traversées font survoler des régions entières mais on ne prend pas le temps d'explorer en profondeur les merveilles des secteurs que l'on traverse.

Enfin, la carte du trajet prévu puis celle du réalisé.

Prévu

Réalisé

Publié dans islande

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
J
Bonjour Big Foot<br /> <br /> Voilà plusieurs semaines que je lis des bouts voire des récits entier sur ton blog, tout en préparant mon voyage en islande. J'ai planifié une première partie (Laugavegur, donc bon pas trop à planifier ceci dit.) et j'ai 2 questions. Notre deuxième partie de randonnée est à Skaftafell et on a 2-3 jours de libres. Je sais pas trop quoi faire.. Dans cet article là tu dis passer par Skaftafell. As-tu quelques idées pour faire un tour rapidement? On compte passer par Jokulsarlon aussi en bus (car à pied j'ai cru lire que c'était 2 jours à pied depuis Skaftafell). Qu'en penses-tu?<br /> <br /> Ma deuxième question est d'ordre matériel. Je ne sais pas quel pantalon prendre? Pantalon D4 en polaire classique, pas coupe vent? + surpants imper/respi? Ou bien un pantalon running softshell (D4 ou Nike). Mais là le hic c'est esthétique. Moulant puis grosses chaussures en en GTX taille 45... Bon. <br /> <br /> Super récit et manière d'écrire, naturelle, j'aime beaucoup.<br /> <br /> On ira du 12 au 23 août pour notre part.
Répondre
D
salut<br /> Skaftafell... le secteur est assez réduit et les randos d'envergure minimale plutôt rares.<br /> j'en vois trois sans réfléchir... Monter à Kristinartindar sommet enchassé entre les glaciers que je n'ai jamais fait mais qui semble prometteur (je crois que c'est un poil vertigineux)<br /> Sinon, en une très grosse journée de 10h a/r, la vallée de Kjos. Là c'est platet les paysages des montagnes environnantes exceptionnelles.<br /> Enfin, par là où j'étais arrivé en 2009, le sommet de Blatindur, plutôt exposé si tu sors du rail (très ténu) mais que j'ai franchi dans le brouillard donc je sais pas ce qu'on voit d'en haut sauf que c'est supposé extraordinaire.<br /> Jokulsarlon/Skaftafell à pied. Aucun intérêt, t'as pas d'autre choix que la route 1.<br /> <br /> Planifier Laugavegur, En effet, y'a pas trop à réfléchir à l'itinéraire mais plutôt juste l'équipement ad-hoc au cas où.<br /> <br /> bah, le côté esthétique... après deux jours de pluie et de chemins boueux, t'y penseras plus.<br /> côté équipement, une seule chose dont je suis sûr (je suis pas du tout versé dans cette partie là): gore-tex, gore-tex et encore gore-tex (ou matériau voisin). <br /> L'Islande, c'est de la pluie régulièrement et à coup sûr beaucoup de vent.<br /> <br /> Merci beaucoup pour ton comm.
S
<br /> Hello à toi!<br /> Alors moi je suis désolée mais je trouve que ce que tu racontes à un semblant de mal être, de malaise, tu es coincé dans ton paradoxe "je ne veux voir personne" et "je veux que tout le monde<br /> s'intéresse à moi" et je trouve que la critique est facile, il faut arrêter un peu, oui tu fais des trucs intéressants mais un peu d'humilité quoi, un peu d'humour dans les récits... Demande aux<br /> gens ce qu'ils ont fait comme parcours, il n'y a pas que toi qui est intéressant dans l'histoire, ce qui enrichit c'est les échanges, les différences.<br /> En parlant d'échange je sais que moi même je ne suis pas très douée en anglais donc j'avoue que c'est vrai que je ne vais pas facilement vers les étrangers car je suis vite bloquée en<br /> conversations, donc on ne peut pas en vouloir non plus aux personnes qui nous entourent de ne pas nous sauter dessus à la première occasion...<br /> Et enfin les personnes qui sont dans leur confort de voiture, alors là je trouve que c'est une critique bien facile, nous n'avons pas tous la chance de pouvoir venir tous les ans en Islande donc la<br /> voiture est un bon moyen de parcourir les 4 coins d'Islande, et je pense que tu es bien content de les rencontrer quand tu fais du stop... Voilà j'adore la randonnée, j'adore les défis mais<br /> j'estime qu'il y a la manière d'en parler et de ne pas croire qu'on a tout fait tout appris... Bonne route 2011 dans ce pays merveilleux<br /> <br /> <br />
Répondre
B
<br /> <br /> tu sais quoi? je suis d'accord avec tes premières lignes.<br /> <br /> <br /> tu oublies juste que je suis dans le narratif présent et que j'essaie de faire passer mes émotions du moment.<br /> <br /> <br /> le soufflet retombe ensuite.<br /> <br /> <br /> je croyais que l'auto-dérision suffisait à casser l'image du gars prétentieux. ça n'a pas marché avec ta conception de l'humour.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Tu n'as pas la chance d'aller tous les ans en islande? mais serais tu prête à accepter tous les aléas qui en découleraient dans ta vie privée? ce n'est pas aussi simple que tu le crois... juste<br /> monter dans l'avion et puis hop hop hop... non ce n'est pas comme ça que ça marche.<br /> <br /> <br /> <br />
J
Bonjour Big Foot.<br /> Curieux d'ailleurs cette "rencontre" avec les créateurs de ma revue préférée, à laquelle je suis abonné depuis le premier jour. Ils sont géniaux!<br /> Il est 2h30 du matin, alors que je voulais me coucher tôt hier soir. Mais pas grave, il fait nuit, on ne voit rien dehors.<br /> Merci pour avoir partagé ton aventure. Je suis jaloux des sensations et des sentiments que tu as vécus, parce que je ne suis pas assez fort pour le faire. Le plus impressionnant pour moi, ce sont les traversées de glacier, ces heures passées en combattant contre ce formidable adversaire.<br /> Oui, c'est vraiment sympa de partager ça, ce qui m'a permis d'en ressentir un petit peu. Fantastique!<br /> Et d'accord avec l'introduction: cette île est quand même spéciale. Je ne sais pas si j'y retournerai un jour, mais j'y pense souvent, et je suis heureux d'y avoir fait tant de photos.<br /> Allez, je vais essayer de dormir, maintenant, et ce n'est pas gagné. Il se pourrait bien que je tombe dans une crevasse, ou que je me glace les pieds dans une bédière. Bel exploit. Trop beau, comme disent les djeunes! Merci.
Répondre
B
<br /> bonjour jef<br /> l'islande m'a permis en effet des rencontres totalement inattendues mais superbes. je me félicite tous les jours d'avoir écrit ces pages (isn't it, T.?).<br /> se rencontrer grace à des traces de pas conservées plusieurs jours dans la boue de þjorsarver, c'est vrai que ce n'est pas banal. salut vous deux, à savoir où vous êtes en ce moment...<br /> se rencontrer en faisant des fautes de frappe à la recherche d'un lien vers une source chaude qui envoient sur mon site, c'est encore moins banal (mais ça c'est pas raconté ici)...<br /> <br /> on voyage différemment, c'est peut- être pour ça que tu es impressionné. tes road-movies n'en sont pas moins extraordinaires, me semble-t'il. juste une approche différente.<br /> <br /> les glaciers ne sont pas si terribles que ça. enfin ceux que j'ai traversés. il sont plats, complètement différents de nos glaciers alpins. la difficulté est de trouver le passage pour monter<br /> dessus. quand tu y'es, il suffit de marcher et faire un peu attention où on pose les pieds. sans oublier que j'avais des infos très précises pour franchir le "terrible" skeiðararjokull et ne pas<br /> m'envoyer dans les zones vraiment craignos (comme disent les djeunes, enfin, je sais pas s'ils le disent encore de nos jours).<br /> <br /> tellement spéciale cette ile que moi j'ai la certitude d'y retourner encore pendant des années. je n'éprouve plus le besoin de découvrir d'autres pays. j'ai trouvé mon paradis.<br /> <br /> merci encore pour tes compliments<br /> <br /> <br />