11/08: Landmannalaugar - Haalda - Hrafntinnuhraun
A quoi m'attendre de spécial maintenant que j'ai vécu ces quelques jours d'exception sous le Torfajökull? A rien, je suis repu d'émotions...
Ah... si j'avais su... bon, ça n'aurait rien changé à mon destin... la moire avait déjà pincé le fil...
J'ai beaucoup de mal à décoller une fois. je discute un moment avec un couple de français rencontré hier soir dans la piscine...
cette année j'ai un énorme problème de sociabilisation... je parle à tout le monde alors que d'habitude je pars en courant de ces endroits là (remember Skaftafell l'an dernier)... ça cache quelque chose...
Alors que je plie la tente et que je tente de faire rentrer mes trente kg dans le sac, j'ai la surprise de voir arriver une délégation de rangers. Une nouvelle fois, ils tentent de me dissuader de descendre la Markarfljot en raft.
Pour m'en débarasser, je leur raconte des bobards, que je connais très bien cette région pour y'être venu souvent, que de nombreux amis m'ont donné toutes les infos nécessaires à une descente sûre, que je ferai systématiquement des reco avant de me mettre à l'eau...
Enfin que des trucs sensés qu'il faudrait que je fasse réellement... En fait, je possède juste les infos de Mika et de ses copains plus les coordonnées gps des rapides que j'ai pu identifiés sur google earth, et vu que l'Islande n'est pas en haute résolution, je n'ai pas pu zoomer très près des zones potentiellement dangereuses...
Pour finir, leur dernière phrase... "take care at the Markarfljot, it's a treacherous river"...
Et je me casse après un dernier salut et un dernier café à mon ami marchand du magic bus que jai rendu milliardaire à force de bières, de pommes et de cafés...
P'tain... si j'avais su combien ils avaient raison, comme la Markarfljot est dangereuse... mais pas comme ça m'est tombé dessus... j'aurais préféré à la loyale, pas de cette manière insidieuse... elle n'avait pas besoin d'employer ces méthodes d'un autre âge... On l'aurait immolée par le feu au moyen-âge (je vous accorde que pour brûler une rivière, il faut se lever tôt)... On en reparle dans deux et trois jours...
Objectif du jour, rejoindre les sources de cette fameuse et légendaire Markarfljot. Je n'ai pas trop décidé du chemin à prendre pour l'atteindre... rester sur le laugavegur dans un premier temps mais marcher dessus me file des boutons ou monter à Haalda qui donc, d'après mes potes islandais offre un point de vue exceptionnel sur l'Islande mais avec un sac à dos tout neuf tout plein à craquer de 30kg...
Tronc commun aux deux chemins pour sortir du champ de lave de Landmannalaugar.
Les gens que je croise regardent davantage mon sac à dos que les paysages... Il faut dire que c'est plutôt rare de voir d'aussi gros sacs qui plus est avec des pagaies accrochées dessus...
Ca me gonfle vite de voir ces regards condescendants, de croiser des groupes du troisième âge et des gamins qui braillent.
Arrivé au croisement, je n'hésite pas 3 secondes pour choisir Haalda...
Sortez d'un chemin décrit dans tous les guides du monde et en moins de trois minutes vous êtes de nouveau seul...
Et les paysages sont bien sympas pour traverser la Namskvisl.
Le chemin va monter sur l'arête tout en bas à gauche...
Tout à droite... hors champ...
Petit déjeuner de midi (c'est devenu coutumier) juste avant d'attaquer la grosse montée (500 mètres de déniv).
Montée de dingue, classique en Islande... Pas un lacet sur le chemin (balisé), the straight line, always the time...
Et oui, je parle super bien anglais après deux semaines en islande (oui, j'ai bien parlé en anglais à 10 personnes)...
Namskvisl (kvisl= fourche (c'est pour désigner les rivières avec de multiples bras à la source)), le champ de lave et Landmannalaugar derrière. Tout au fond la Jokulgil d'où je suis arrivé hier soir.
Haalda... le sommet du fond... Pour la première fois, je vois un chemin en lacets... une touche très Alpes du Sud, je trouve sur cette face pelée entaillée par cette draille.
Monter à Haalda, c'est une randonnée atypique dans le Landmannalaugar. La vue que l'on y a est féérique mais on sort du secteur des ryolithes. C'est beaucoup moins coloré. Si on veut de la géothermie, ce n'est pas la rando à faire, par contre, si on veut une vue d'ensemble sur l'islande, c'est là qu'il faut monter... Si on boucle et que l'on rentre par le Laugavegur, on retrouvera les ocres du Landmannalaugar
Le drame de la journée...
... Les gens... Mais qu'est ce que j'ai fait de mal pour qu'on vienne me les briser même ici alors que je n'aspire qu'à tranquilité et solitude?
Ah la fatalité... A un replat de la montagne, juste sous les lacets, je rejoins une équipe de tournage télé allemande. Etant poli et courtois et ne désirant surtout pas bousiller leur scène, je stoppe hors champ et fais silence...
Scène courte, je m'approche d'eux puis commence à discuter. Ils sont une petite dizaine au total. La boss, caricature du metteur en scène telle qu'on peut les imaginer avec la veste sans manches kaki pleine de poches de partout (elle est pas au courant qu'ils n'utilisent plus de pellicules dans les caméras?), un peu style Spielberg tournant Jurassic Park. J'ai l'impression qu'elle se prend pour Meryl Streep dans Out of Africa, sauf qu'elle me fait plutôt penser à Josiane Balasko.
Pourquoi je parle comme ça d'elle? Parce qu'elle m'a gavé... Mon sac à dos toujours... Et vous êtes fou de porter si lourd, et il ne faut pas plus de 20% de son poids... Oh, my god!!! (dit elle en essayant de le soulever, et elle n'arrive même pas à le décoller du sol)...
Je lui demande si elle s'inquiète autant du dos de ses sbires qui transportent des caméras et des micros de la taille de lance-roquettes...
Elle m'énerve aussi parce que leur groupe avance à la même vitesse que moi, environ 200 mètres devant et que pour ne pas les déranger dans le tournage, je fais mes stops en même temps qu'eux pour ne pas les déranger. Mais moi, ce n'est pas trop mon style de subir celui des autres. C'est plus fatiguant, ça me dérange et ça ne correspond pas à mon concept de la liberté de subir les conneries des gens.
Au moins, je prends le temps de pauses photos (en pose vitesse)...
Landmannalaugar
Le lac Frostastaðavatn, la Tungnaa et le Vatnajökull
Höfðavatn en regardant vers Landmannahellir...
Landmannalaugar d'encore un petit peu plus haut... Cette coulée en travers de Namkvisl ne cesse de m'impressionner.
Après la première grosse série de lacets, je craque... Après tout, pourquoi je devrais me conformer à leur délire et pas le contraire? M'en fous si je bousille une de leurs prises, il faut que je passe devant et que je continue à mon rythme. l'islande est mon seul moment de liberté totale de l'année, le seul moment où je n'ai vraiment rien d'autre à penser qu'à moi et voilà que je m'adapte au bon vouloir d'autres (qui ne m'ont rien demandé en plus).
Et puis, à Josiane, je vais lui montrer qu'un sac de 30kg n'est pas un handicap pour monter 500m de déniv d'un trait...
Et gnagnagna... Quand les nerfs montent... je suis en effet capable de n'importe quoi...
Je les rejoins à moins de 20 mètres. Ils sont en pleine prise. Je suis trop gentil. Je m'arrête encore une fois. Trente secondes et ils finissent. Je les rattrape enfin très vite. Josiane transpire comme un phacochère. Je sens que je les gonfle encore plus qu'eux ne me gonflent... Ils avaient qu'à partir plus tôt s'il voulaient être seuls, moi aussi d'ailleurs, sauf que moi je bosse pas. C'est quoi ces faignasses qui se lèvent à 9h00 pour aller bosser?
Comme dit mon grand père: le travail du matin se voit toute la journée.
Tant pis pour leur gueule s'ils finissent pas leurs prises aujourd'hui.
Un éléphant au milieu d'un magasin de porcelaine je suis, en pleine montée à Haalda... Qui l'eut crû?
Mais vaut mieux être un éléphant qu'un phacochère, moi, je vous le dis...
Des nerfs, je monte d'une traite au sommet tandis qu'eux, au contraire font leur pause déjeuner. J'iamgine que c'est un choix stratégique de leur part pour que je prenne sufisamment d'avance.
J'arrive en haut complètement détruit. Pas fait un stop pour donner raison à Jos.
Uhhhhhh...........uhhhhhhhhhh..............uhhhhhhhhhhhhh......
Je suis mort, mais l'honneur de la France est sauf sous le regard de l'Allemagne vaincue ... Euh... Gutten Tag Dieter, Gutten Tag Andreas, Gutten Tag Tommy, Gutten Tag Sandra...
Portons haut l'étendard, la cocarde épinglée sur le plastron, chantons la Marseillaise... Soyons fiers de ce que nous
représentons... les droits de l'homme, la pénicilline, le vaccin contre la rage, le champagne, la cocotte minute, la mayonnaise, la guillotine, la photographie, le cinéma, Pascal, Descartes, le soutien gorge, le sous-marin à propulsion, Motobécane, Proust, Verlaine, Le kaléïdoscope de Denise Fabre et Garcimore (aide portugaise), la coupe du monde 98, secret story, Zidane, Hara-kiri, Sardou, Johnny (qu'on a volé aux belges)... Paris Match, la Tour Eiffel, le concorde, les embouteillages de la place de la Concorde, Condorcet, Codorniou, l'écho des savanes, les 3 suisses...
Haalda, effectivement une vue sur l'ensemble des hautes terres de l'Islande...
Pour moi qui suis féru de cartographie, s'étalent sous mes yeux tous les reliefs lus maintes et maintes fois...
Frostastaðavatn, Tungnaa, Veiðivötn et vatnajökull
Le systême collinaire entre Hrafntinnusker et Torfajökull, autrement dit les entrailles du Landmannalaugar
Storihver, Hrafntinnusker...
vers le nord, la région de Landmannahellir (je connais pas du tout)
Re Landmannalauagr pour la dernière fois cette année, à regrêts de quitter l'endroit ultime, the place where you have to be.
la vallée de la Jokulgil derrière le champ de lave... tout au fond les montagnes noires et vertes annonçant Eldgja.
Et une dernière pour dire que le tour panormique est bouclé.
Récapitulons tout ça en vidéo pour voir si vous avez bien suivi...
dans l'ordre...Langjökull, Kjolur, Kerlingarfjöll, Hofsjökull, Sprengisandur, Tungnafellsjökull, Vonarskarð, Vatnajökull, Veiðivötn, les montagnes entre Tungnaa et Skafta, Landmannalauagr et la Jokulgil, Torfajökull, Haskerðingur et Hrafntinnusker, le piquet du sommet de Haalda, à peine dans le fond le Myrdalsjökull (on voit pas le seul mondialement connu, l'Eyjafjallajökull), Hrafntinnuhraun (désert d'obsidiennes où je me rends ce soir) et Laufafell (où v ase nouer le drame que vous attendez tous avec impatience, vils que vous êtes), Tindjafjallajökull et enfin Reykjadalur...
Ah elle est belle la fierté française vacillante, mais heureusement à l'abri du regard de ces fourbes germains...
Parce que bon, l'Allemagne, c'est peanuts à côté de nous autres français, piliers et ciment de l'europe...
L'Allemagne, c'est: Krupps, les breitzels, la porte de Brandebourg, Séville 82, le moteur à réaction, Bismark, Volkswagen, 99 Luftballons et le Bayern Munich (et encore on leur a filé Ribéry pour qu'ils gagnent (le championnat, pas le prix nobel, ça se saurait))
On est vachement plus forts qu'eux, hein?
Au fait Cédric et Elyane, j'en profite pour réfléchir à l'importance de la Belgique et de son aura dans le monde: Annie Cordy, Plastic Bertrand, le Manneken piss, Anderlecht et la bière...
J'adore faire ces listes à la Prévert... C'est d'une stupidité sans nom... Les clichés parfaits, les images d'Epinal minables... les a priori qui font que nous ne sommes pas capables de nous comprendre et de nous aimer...
Y'a un truc qui est sûr en tout cas, c'est que nous français, nous sommes les meilleurs amants de l'univers (et surtout moi).
N'empêche que j'ai super mal au ventre et que donc je vais devoir écourter la journée et essayer d'éviter les gros efforts. Dès le premier vallon orienté vers l'ouest (voir photo précédente), je quitte le chemin pour le descendre vers ma destination prévue ce soir, Hrafntinnuhraun (le désert du corbeau, parce qu'il est noir d'obsidiennes).
Tant pis pour toutes les fumerolles sous Hrafntinnusker que je voulais approcher. Je n'en ai pas la force.
Plus qu'à suivre le sillon...
Bonjour madame, la route pour Hrafntinuhraun, s'il vous plait?
Est ce qu ej'ai l'air d'un corbeau? qu'elle me répond... hein? alors comment veux tu que je sache où se trouve un truc de corbac?...
Ok... ça doit être par là...
De toute façon, faut descendre...
Je marche dans la Markarfljot, le monstre qui leur fait si peur... ahahahah, je ris...... Bon, ce n'est qu'un des bras à sa naissance.
Elle est déjà plus grosse que la Loire au Gerbier-de-Jonc.
Jamais trop d'eau, descente simple, pas de surprise... De très très rares fumerolles (je deviens exigeant)...J'aboutis très vite dans la plaine où confluent les deux bras principaux. Eau de source, claire, rien à voir avec ce que l'on habitude de voir de la Markarfljot.
Dans cette petite plaine passe la piste qui mène de la f208N à Hrafntinnusker. Au bout de la plaine, Hrafntinnuhraun, une des coulées de lave les plus spectaculaires qu'il soit donné de voir en Islande. Immense, je n'ai pas eu le courage de m'y balader.
J'ai deux sons de cloche pour marcher dans cette coulée.
Opposés: 1/ c'est génial au milieu des obsidiennes de marcher dans les sillons
2/ c'est l'enfer, infranchissable, limite dangereux.
Je ne donnerai don pas mon avis... Mais je fais particulièrement confiance à celui qui m'a donné la première hypothèse.
Ce soir, je plante la tente en rive droite, juste en face de la coulée.
Et demain, je me mets à l'eau pour descendre la Markarfljot sur le raft... Fini le poids sur les épaules, toute la charge sera portée par le bâteau.
Sauf qu'il y'a pas d'eau... Maxi à mi-mollets.
Adieu, veaux, vaches, cochons, rafting...
Va falloir encore trimballer le bordel sur les épaules en marchant le long des rives...
La zone où je suis s'appelle Reykjadalir (la vallée des fumées)...
Une fois la tente dressée, j'irai en voir quelques unes pas trop loin de là.
Mais je suis inquiet. C'est pas normal que je sois aussi fatigué...
L'emplacement du bivouac est en tout cas sublime... bien réconfortant.
Beaucoup de vent malgré tout en ce début de soirée et de gros nuages qui montent à l'horizon...
Encore une fois la taille de Hrafntinnuhraun et l'absence d'eau dans la Markarfljot...
Ben là, on s'est moqué de moi... On m'aurait menti? comment je fais, moi, pour faire du bâteau?
Un petit tour vers les solfatares du coin. J'en visiterai deux ou trois...
Les islandais n'ont de cesse de dire que la piste qui passe là est sans doute l'une des plus belles d'Islande.
Suivante...
Je marche un peu le long de la gorge formée sous la coulée de lave... Quelques fumées là aussi... Le niveau d'eau est définitivement trop bas...
Gros dodo avec les réveils habituels de 22h et 2h00 sans problème.
... pour la dernière fois...